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Photo du rédacteurLe JDD

Othman Nasrou au JDD : «Quand un professeur est menacé, il ne doit pas y avoir de débat»

Dernière mise à jour : il y a 6 jours

Vous vous rendez aujourd'hui à la marche blanche en l'honneur de Samuel Paty, assassiné le 16 octobre 2021. Depuis, il y a aussi eu la mort du professeur Dominique Bernard... Quelles mesures envisagez-vous pour mettre un terme à ces drames ?


Effectivement, je serai présent ce matin à Éragny-sur-Oise pour la cérémonie d'hommage à Samuel Paty. Mais au-delà des commé-morations, nous souhaitons offrir une réponse concrète. Aucun professeur, aucun agent public ne doit être une cible quand il défend la laïcité et les valeurs de la République. La volonté du gouvernement de défendre chacun de ses agents est totale. C'est la raison pour laquelle je souhaite que l'octroi de la protection fonc-tionnelle, c'est-à-dire la prise en charge de l'accompagnement juridique de l'agent, puisse être automatique dans les cas d'agression et d'outrage, en particulier dans les cas de remise en cause du pacte républicain. Ces demandes de protection sont déjà nom-breuses, ce qui est à la fois une bonne nouvelle, car les agents se saisissent de ces outils de protec-tion, et révélateur. Concernant les enseignants, les demandes de protection s'élèvent à 5 264 pour l'année scolaire 2023-2024, soit une augmentation de 29 %. Cette protection fonctionnelle ne doit pas être qu'un appui juridique, mais un accompagnement global. Pour cela, nous travaillons avec Guillaume Kasbarian [ministre de la Fonction publique, NDLR] à déployer toute une série de mesures pour mettre les agents à l'abri, et sanctionner ceux qui contestent nos lois.


Ce qui nécessite de travailler avec la justice. La loi doit-elle évoluer pour mieux protéger les Français ?


Le Premier ministre a déjà ouvert la voie aux courtes peines, et le garde des Sceaux envisage des exceptions à l'excuse de minorité. Chaque incivilité à l'encontre d'un agent public doit être sanctionnée. Notre défi est de le faire des la première infraction, pour que tous les agents aient la conviction que l'Etat est a leurs cotés. Notre gouvernement sera toujours en soutien de ceux qui font appliquer la loi.


Pourtant, comme le révélaient cette semaine le JDD et CNews - information confirmée par votre ministère -, des professeurs du lycée de Tourcoing ont pris la défense de l'élève qui a fait preuve de violence contre l'autorité...


J'ai été très choqué de voir que la défense d'un professeur qui fait son travail et qui fait appliquer la laïcité n'est pas unanime, que certains avaient défendu cette élève - au nom même de la lutte contre les discriminations - plutôt que la professeure agressée. Il y a là une inversion totale des valeurs qui n'est pas acceptable et qui en dit long sur la situation dans laquelle nous nous trouvons. Certains de nos principes ne sont plus évidents pour tout le monde et doivent être réexpliqués. Le chantier est immense.

« Le nombre de mineurs radicalisés est en forte hausse»

Néanmoins, en 2021, Didier Lemaire, professeur de philosophie qui avait dénoncé l'islamisme à Trappes et que vous aviez vous-même défendu, n'a pas eu droit au soutien de l'État...


Je m'étonne encore que le monde politique n'ait pas eu le réflexe, à l'époque, de défendre un enseignant en danger. Quand un professeur est menacé, il ne doit pas y avoir de débat. Je veux dire à chaque professeur, à chaque agent : il n'y aura aucun débat quand il s'agira de vous protéger.


Ces atteintes ne sont pas nouvelles. L'État n'a-t-il pas sa part de responsabilité, comme le déclarait la femme du gendarme Eric Comyn ou encore la sœur de Samuel Paty ?


La laïcité est attaquée aujourd'hui dans notre pays comme jamais elle ne l'a été. Pour le premier trimestre de l'année scolaire 2023-2024, ce sont 3 306 atteintes qui ont été signalées, dont 1 034 concernant Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la Citoyenneté, livre son plan d'action au JDD. l'abaya; puis 1 731 pour le deuxième trimestre. C'est un sujet sur lequel le gouvernement est décidé à agir et nous mobiliserons tous les moyens dont nous disposons pour aller au bout de ce combat. Nous ne laisserons aucun de nos agents publics subir le « pas de vague ».


Vous attendiez-vous à être confronté à une telle réalité en arrivant au ministère ?


Il y a les chiffres théoriques que nous connaissions déjà, mais depuis le ministère de l'Intérieur, nous voyons la réalité qui se cache derrière les statistiques: des vies brisées, des récits terribles. Chaque jour qui passe ici au ministère de l'Intérieur doit être un jour utile pour changer les choses.


Il s'agit donc d'une forme d'islamisme qui progresse ?


Je n'ai pas peur d'employer les mots justes. Cette radicalisation est nourrie par un repli communautaire. C'est bien de cela dont il s'agit à Tourcoing, avec comme règle. La loi contre le séparatisme de 2021 a permis de poser des fondations juridiques dans cette bataille mais nous devons encore agir pour endiguer cette idéologie qui fait des ravages.


Et ce phénomène touche de plus en plus de jeunes...


Le sujet de l'ultraviolence chez les jeunes dépasse les frontières françaises. Nous vivons une crise de l'autorité, qui s'affaiblit. Par ail-leurs, la violence n'est pas sans lien avec les écrans et l'influence des réseaux sociaux, dont certaines plateformes particulièrement préoccupantes qui sont peu mode-rées. Je me rendrai prochainement auprès des équipes de Pharos, [site de signalement de contenus illicites, NDLR] pour m'assurer qu'ils disposent de tous les outils de veille, de recueil et de signale-ment. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Le nombre de mineurs mis en cause dans des associations de malfaiteurs à caractère terroriste est passé de 1 % en 2022 à 10% en 2023 et 21% en 2024. Ces chiffres reflètent la forte hausse du nombre de mineurs identifiés pour radicalisation et intention de passage à l'acte. Avec Bruno Retailleau, nous sommes déterminés à mener une guerre sans merci à ce séparatisme islamiste qui nous menace aujourd'hui.


Avec de tels propos, certains pourraient vous taxer d'islamophobie, si ce n'est pas déjà le cas. Qu'avez-vous à leur répondre ?


Je leur réponds que je ne confonds pas les Français de tradition, de culture ou de confession musulmane qui respectent les règles et les valeurs de la République, avec les islamistes. Les premiers ne sont pas en cause et doivent être respectés; les seconds doivent être combattus. Ceux qui veulent nous faire croire que la laïcité est synonyme d'islamophobie mentent. C'est un piège où tombe une partie de la gauche et de l'extrême gauche. La laïcité ne va pas contre les religions, au contraire : elle est d'abord une liberté qui garantit leur expres-sion, à condition de respecter les règles de la République. Nous sommes dans une bataille culturelle pour défendre ces principes.


Au-delà des professeurs, quels sont les secteurs où les agents publics sont le plus touchés par ces attaques ?


La réalité est que ce phénomène touche absolument tous les secteurs. Évidemment, nous pensons avant tout à l’école, à l’hôpital et aux forces de l’ordre ; mais le repli communautaire et la radicalisation touchent la société entière. Nous devons y mettre un coup d’arrêt.


PROPOS RECUEILLIS

PAR PHILIPPINE FARGES

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